Comment se remettre d’un ghosting (alors qu’on a passé l’âge) ?

Chaque mois, nous partageons vos doutes, vos questions, vos envies à notre réseau de spécialistes pour décortiquer ensemble ce qui peut vous bloquer et voir comment surmonter cela.

Bienvenue dans La Consult’ !

S’il y a un mot que l’on pourrait ajouter au vocabulaire du dating édition 2022, c’est ghosting. Vous savez, cet acte qui consiste à disparaître subitement et sans la moindre explication.
Si vous avez déjà eu la mauvaise expérience de vous faire “ghoster”, vous savez à quel point cela peut saper la confiance en soi… et en l’autre.

Aujourd’hui, c’est Margot Fried-Filliozat, sexothérapeute, écrivaine et conférencière qui nous coache pour gérer ce phénomène et continuer d’avancer sereinement.

Even : Margot, pourquoi est-ce que cela fait si mal d’être ghosté.e ?

Margot Fried-Filliozat : Ce qui est difficile quand une personne arrête de nous répondre, c’est bien sûr le fait de se sentir rejeté.e sans savoir pourquoi. Très souvent, c’est là que le cerveau se met à tout décortiquer, à repasser tous les moments échangés pour essayer de comprendre : “qu’ai-je fait ou mal fait ? Qu’ai-je dit pour le/la contrarier ?” Toutes nos peurs s’activent.
Mais on se dit rarement que l’autre n’était pas disponible émotionnellement, qu’il ou elle n’était pas prêt.e à s’engager.

On est centré.es sur nos peurs plutôt que sur l’autre finalement…

MFF : Tout à fait. Commencer une relation vient toujours activer nos peurs, nos croyances, nos pensées limitantes sur nous-mêmes et encore plus si on se sent fragilisé.e, avec un manque de confiance en soi.
Ce que j’observe beaucoup parmi les personnes qui viennent me voir est qu’elles se posent davantage la question “vais-je plaire ?” au lieu de “est-ce que cette personne me plaît ?’.
Quand on a vécu une rupture et que l’on n’a pas séduit depuis longtemps, il est tout à fait compréhensible de ressentir de l’insécurité.
On se concentre alors sur l’envie de plaire, sur une “validation générale” au lieu de se demander ce que l’on recherche, ce que l’on souhaite vivre désormais.

• Qu’est-ce que je souhaite ?
• Séduire ou être avec quelqu’un de disponible émotionnellement ?

Avez-vous déjà été confrontée au “ghosting” avec vos patients ?

MFF : Absolument. Une de mes patientes avait rencontré un homme plusieurs fois, avait commencé à tisser une relation, mais du jour au lendemain elle n’a plus eu de nouvelles. Elle a envoyé quelques messages restés sans réponse.
Six mois plus tard, elle a reçu un message de lui, expliquant que son père était décédé subitement et qu’à partir de là, il s’est complètement renfermé, ne s’est plus senti capable d’interagir avec le monde, il est tombé en dépression et commençait à en sortir quand elle a reçu le message.
On a besoin de s’ouvrir un peu plus à la possibilité que l’autre peut avoir des raisons qui n’ont finalement rien à voir avec nous.

Comment réagir quand on se retrouve confronté.e à ce phénomène ?

MFF : On peut se demander deux choses :

• D’abord, quelle est ma responsabilité ? Peut-être a-t-on projeté ses peurs sur l’autre ? Peut être que l’on a été froid.e et distant.e sans s’en rendre compte ? Peut-être que l’on porte en nous la peur ou croyance “je ne suis pas digne d’être aimé.e », “je ne suis pas désirable”, etc. Peut-être que cela s’est ressenti dans notre comportement où on a juste testé l’autre constamment pour voir “est-ce que tu m’apprécies vraiment ?”.
  L’autre a alors pu en avoir assez et s’est éloigné.e. C’est ce que j’appelle prendre une responsabilité “juste”.
  Ne pas se dire “je suis nul.le” mais plutôt que puis-je travailler pour guérir les parties blessées à l’intérieur de moi et être vraiment disponible et conscient.e dans cette démarche de relation. C’est là qu’une thérapie peut-être intéressante.
• Ensuite, la deuxième dimension dont on a parlé auparavant c’est d’avoir conscience que l’autre aussi existe. Peut-être que la personne a paniqué, qu’elle s’est rendue compte qu’elle n’était pas disponible, qu’on ne lui plaît pas et qu’il/elle ne savait pas comment le dire.
  Souvenons-nous que si ce n’est pas lui ou elle, ce sera une autre personne !
  D’ailleurs tout le monde ne ghoste pas sur les applications de rencontres, beaucoup sont capables de donner une raison pour dire qu’il/elle ne poursuivront pas les échanges.

On pourrait presque croire que se faire ghoster nous rendrait service…

MFF : Bien sûr il est beaucoup plus agréable et juste que la relation se termine avec une discussion. Cela nous permet de clore le chapitre, de comprendre ce qui a mené à cette fin et cela évite au cerveau de la personne qui est quittée de partir dans des réflexions trop profondes.
Mais, si la personne qui “ghoste” manque déjà des compétences relationnelles de base pour poser une limite, pour expliquer ce qu’il ressent, on peut s’attendre à ce que la relation soit le reflet de ça.

Si une personne “ghoste”, c’est qu’elle n’est pas disponible émotionnellement.
N’est-ce pas alors mieux que cela s’arrête dès maintenant ?

Pour finir, comment gérer un ghosting qui arrive après plusieurs rendez-vous, quand la relation semble avoir vraiment démarré ?

MFF : Je dirais qu’il est beaucoup plus rare d’être ghosté.e dans ce type de situation… sans aucun signe avant-coureur.
Le problème est qu’au début d’une relation, on a envie d’y croire. On n’a pas envie de voir les drapeaux rouges tels que “je ne suis pas prêt.e à être avec quelqu’un” par exemple. On n’écoute pas vraiment où en est l’autre, on peut se dire qu’avec le temps, cela va changer. Quand on débute une relation, on a besoin de s’autoriser à être honnête avec la situation.
À trop rêver de la situation, on oublie de la voir telle qu’elle est.

> Merci à Margot Fried-Filliozat pour ses conseils et ne manquez pas son dernier livre L’intelligence intime.